En somme, cela signifie pour les utilisateurs de la distribution GNU/Linux destinée aux serveurs et aux postes de travail que CentOS 8 sera abandonnée plus tôt que prévu. Initialement, la maintenance de cette distribution devait être assurée jusqu’au 31 mai 2029. Mais contre toute attente, Red Hat a décidé unilatéralement de rapprocher cette date au 31 décembre 2021. En plus de cette annonce qui vient couper l’herbe sous les pieds des utilisateurs utilisant CentOS 8, Red Hat déclare qu’il n’y aura pas de version 9 de CentOS. À la fin du cycle de vie de CentOS 8, les utilisateurs de CentOS devront soit se tourner vers CentOS Stream 8 qui est utilisé en amont pour le développement de RHEL 8, soit payer pour utiliser RHEL 8 ou chercher d’autres alternatives.
Évolution de CentOS Linux au fil des années
Pour ceux à qui toutes ces informations ne parlent pas, il faut savoir la distribution GNU/Linux CentOS a été créée par Gregory Kurtzer en utilisant un projet nommé CaOS Linux. Elle a ensuite été fusionnée avec le projet de Rocky McGough et Lance Davis pour former CentOS. En mai 2004, la première version de CentOS est sortie en s’appuyant sur la build de RHEL 2.1AS. À partir de là, CentOS a connu une forte adoption auprès des individus et aussi des entreprises. Selon les données compilées par W3Techs, en juin 2010, CentOS est devenue la distribution GNU/Linux la plus populaire sur les serveurs web avec plus de 30 % de part de marché. Actuellement, elle se place en deuxième position derrière Ubuntu (47,6 %) avec 18,8 %, selon les données de W3Techs.
Le 7 janvier 2014, Red Hat et l’équipe de CentOS ont annoncé une mutualisation de leurs ressources pour proposer « un nouveau CentOS capable de faire progresser le développement et l’adoption des technologies open source de nouvelle génération ». Dans les faits, Red Hat a commencé à financer le projet CentOS avec en contrepartie la récupération de la gouvernance du projet. Après avoir pris la tête du nouveau conseil d’administration de CentOS qui a été créé à la suite du rapprochement avec CentOS, Red Hat a embauché plupart des membres de l’équipe de développement de CentOS. Pour couronner le tout, en juillet 2019, IBM a racheté Red Hat pour 34 milliards de dollars.
Après le rapprochement de l’équipe de Red Hat et celle de CentOS, les projets CentOS et RHEL ont continué à être distribués comme auparavant. Red Hat qui intègre dans RHEL des logiciels sous licence GPL doit mettre à la disposition du public le code source de sa distribution. Une fois les codes sources disponibles, CentOS les utilise pour produire sa version à l’identique. RHEL en version binaire étant disponible qu'en payant un abonnement, CentOS se présente donc comme une version gratuite en aval de RHEL. Mais avec la récente annonce de Red Hat, il se trouve que CentOS ne sera plus disponible en aval de RHEL, mais plutôt en amont de RHEL.
Quelques réactions des utilisateurs de CentOS Linux
Comme on pouvait l’imaginer, cette récente annonce n’a pas laissé indifférents les utilisateurs de CentOS. Plusieurs utilisateurs ont réagi pour crier leur mécontentement. « C’est affreux. C’est la preuve des inconvénients de l’acquisition de Red Hat par IBM. Imaginez si vous dirigiez une entreprise et avez déployé CentOS 8 sur la base de la promesse d’une durée de vie de 10 ans. Vous êtes totalement foutu maintenant, et Red Hat le sait », a fait remarquer un internaute. « CentOS a toujours été une alternative gratuite à Redhat. Moi et beaucoup d’autres personnes l’avons utilisée parce que c’était un moyen de profiter des avantages de Red Hat sans payer. C’est vraiment assez intelligent de leur part d’inciter les gens à cesser de faire ce qu’ils faisaient et de les amener à payer de l’argent pour soutenir leurs équipes de développement. Les gens qui ne sont pas prêts à payer (moi y compris) sont maintenant à juste titre embêtés. Mais nous n’avons jamais été leurs clients en premier lieu, donc nous n’avons pas vraiment d’importance », souligne un autre utilisateur.
« En faisant de CentOS une distribution de test, Red Hat détruit complètement son utilité en tant que système d’exploitation stable, libre et prêt pour l’entreprise. Cette décision semble être une stratégie de Red Hat pour convaincre les gens qui veulent un système d’exploitation d’entreprise stable d’être forcés de migrer vers leur système d’exploitation à but lucratif, d’un coût prohibitif », dénonce une pétition ouverte sur le site change.org et qui a déjà mobilisé plus de 8000 voix. « Red Hat vient simplement de tuer CentOS. Mais qu’il ne s’imagine pas qu’il va récupérer la base d’utilisateurs de la distribution », confie un intervenant.
Red Hat tente de rassurer les utilisateurs avec CentOS Stream
Pour rassurer les utilisateurs de CentOS, Chris Wright, vice-président senior et directeur de la technologie de Red Hat explique sur le site de l’entreprise qu’« en septembre 2019, nous avons annoncé CentOS Stream, une plate-forme de développement en amont conçue pour les membres de la communauté CentOS, les partenaires Red Hat, les développeurs d’écosystèmes et de nombreux autres groupes et qui permet de voir plus rapidement et facilement ce qui suit dans Red Hat Enterprise Linux (RHEL) pour aider à façonner le produit. Depuis son introduction, nous avons constaté un grand enthousiasme de la part des partenaires et des contributeurs autour de CentOS Stream et du flux continu d’innovation que le projet fournit ».
Eu égard à cela, nous avons informé le conseil d’administration du projet CentOS que nous transférons entièrement notre investissement de CentOS Linux à CentOS Stream. Pour soutenir cette décision, le vice-président avance que Facebook qui gère des millions de serveurs prenant en charge son vaste réseau social mondial a migré (ou est en train de migrer) vers un système d’exploitation dérivé de CentOS Stream. Il précise que le réseau social a reconnu déjà la valeur de CentOS Stream et contribue à stimuler l’innovation interne de cette distribution. Comme autre exemple pour justifier la bonne foi de Red Hat suite aux récentes décisions de l’entreprise, Chris Wright rapporte qu’Intel, partenaire de longue date de Red Hat, est également engagé avec CentOS Stream. En outre, Red Hat précise que « CentOS Stream ne remplace pas CentOS Linux ; il s’agit plutôt d’une prochaine étape naturelle et inévitable destinée à atteindre l’objectif du projet qui est de promouvoir l’innovation Linux en entreprise ».
Comme avantages, l’entreprise explique que « Stream raccourcit la boucle de rétroaction entre les développeurs de tous les côtés du paysage RHEL, ce qui permet à toutes les voix, qu’il s’agisse de grands partenaires ou de contributeurs individuels, d’être entendues lors de l’élaboration des futures versions de RHEL ». C’est pourquoi « transférer l’intégralité de notre investissement vers CentOS Stream est le meilleur moyen de stimuler davantage l’innovation Linux en donnant à la communauté de l’écosystème au sens large une connexion plus étroite au développement de RHEL », a souligné Chris Wright. Il ajoute que « CentOS Stream se situe désormais entre l’innovation du système d’exploitation du projet Fedora et la stabilité de production de RHEL ». Et de conclure en déclarant que « pour faire de CentOS Stream le principal centre d’innovation de l’écosystème RHEL, nous transférerons nos investissements vers CentOS Stream exclusivement le 31 décembre 2021. Notre engagement envers CentOS Linux 7 se poursuivra jusqu’à la publication des mises à jour de maintenance de la distribution en 2024 ».
Quelles alternatives s’offrent aux utilisateurs après la fin de CentOS ?
Pour de nombreux utilisateurs, même s’il est possible d’utiliser CentOS 7 jusqu’en 2024, cette annonce de Red Hat sonne comme une incitation à trouver une autre solution pour remplacer la distribution, car nombreux sont ceux qui n’ont plus confiance en Red Hat. En effet, pour certains utilisateurs, « voir une grande entreprise comme Red Hat effectuer ce type de changement brusque, qui a un impact opérationnel majeur sur une large base d’utilisateurs, sans indication claire à suivre, est un précédent effrayant ». Pour d’autres, cette décision n’est que la résultante de celles d’IBM de s’en mettre plein les poches après avoir investi des milliards pour acquérir Red Hat.
Cependant, tous les utilisateurs ne partagent pas cette même colère. Un utilisateur fait remarquer qu’il n’y a rien de déraisonnable dans la décision de Red Hat. Il ajoute que le modèle annoncé par l’entreprise est assez similaire à d’autres projets open source — nous vous offrons un logiciel gratuit, mais vous le testez en version bêta pour nous. Pour un autre intervenant, les raisons de ce changement opéré par Red Hat sont purement d’ordre technique. Cela permettra d’intégrer facilement à RHEL les fonctionnalités et bugs corrigés de CentOS. En tout état de cause, quelles que soient les raisons avancées, la messe est dite pour certains utilisateurs : il faut trouver de nouvelles alternatives à CentOS Linux. Comme solutions de remplacement, l’on a par exemple :
Rocky Linux : est un nouveau projet qui vient d’être annoncé par Gregory Kurtzer, le cofondateur de CentOS. Selon l’auteur, il sera conçu pour être 100 % compatible avec Enterprise Linux maintenant que CentOS a changé de direction. Rocky Linux vise à fonctionner en aval comme CentOS le faisait après que les entreprises ont ajouté leurs commits et non avant. Les utilisateurs pourront donc l’utiliser en production.
Oracle Linux : est une distribution Linux compilée à partir du code source de Red Hat Enterprise Linux. Elle est distribuée gratuitement par Oracle et disponible partiellement sous la licence publique générale GNU depuis fin 2006. Pour les entreprises qui utilisent les systèmes Oracle, Oracle Linux est considéré comme le choix idéal.
ClearOS : se présente comme un système d’exploitation simple, sécurisé et abordable basé à la fois sur CentOS et RHEL. Il fournit une interface Web intuitive et un magasin d’applications avec plus de 100 applications. ClearOS est disponible en 3 éditions principales : Home, Business et Community Edition. L’édition Home est idéale pour les petits bureaux. L’édition Business est conçue pour les petites et moyennes entreprises qui préfèrent bénéficier d’un support payant, tandis que l’édition Community est absolument gratuite.
Springdale Linux : (anciennement PUIAS Linux) est un système d’exploitation complet pour les postes de travail et les serveurs, construit avec les packages sources de Red Hat Enterprise Linux. En plus des packages hérités de RHEL, le projet fournit également plusieurs autres référentiels : « Addons » qui contient des packages supplémentaires non inclus dans une distribution standard de Red Hat ; « Computational » qui contient des logiciels spécifiques au calcul scientifique ; et « Unsupported » qui contient divers packages expérimentaux. La distribution est maintenue par l’Institute for Advanced Study et l’Université de Princeton aux États-Unis.
CloudLinux : est une distribution de reconstruction RHEL conçue pour les fournisseurs d’hébergement partagé. Étant donné qu’elle requiert des frais d’abonnement pour une utilisation en production, CloudLinux ressemble plus à RHEL qu’à CentOS. Cependant, à la suite de l’annonce de Red Hat, les responsables de CloudLinux OS ont déclaré qu’ils publieraient un remplacement de CentOS au premier trimestre 2021. Le nouveau fork sera un « OS séparé, totalement gratuit, entièrement compatible avec RHEL 8 et les versions futures ».
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